Un peu d’histoire
Histoire de Disraeli.
Merci à La Société Historique de Disraeli tout spécialement à Jean-Claude Fortier pour son aide.
LA FONDATION
L’arrivée des premiers occupants de notre paroisse remonte à la fin des années 1850, époque où les ‘Eastern Townships’ s’ouvrent aux Canadiens-français et où les seigneuries de la vallée du St-Laurent déversent leurs surplus de population dans les terres inoccupées de nos régions, Les archives nous informent que Frédéric Dawson en 1855 et Olivier Miray en 1857 se seraient installés aux environs du lac Breeches, mais ces premiers occupants n’ont laissé que peu de trace de leur venue. Il faut attendre jusqu’en 1868 avant qu’un entrepreneur M. Octave Champoux de Statford, , trouvant le site des Bulls’ Head Falls (aujourd’hui Chutes Champoux) propice à l’établissement d’un moulin à scie, et y installe deux de ses fils et confie la direction du moulin à John Champoux, le plus jeune de la famille.
La colonisation de Disraeli se fera à partir de deux grands axes ; le chemin Lambton (route allant vers Ste-Praxède) et le Breeches (route allant vers St-Jacques-le-Majeur.) En 1873, Onésime Fortier ouvre le rang de Lambton . Suivront Siméon, Charles et Alexis Gagnon. Jules Roy viendra les rejoindre en 1879. David Binette installera, en 1874, un commerce sur le Chemin Lambton (rue Champoux). A partir de 1877, un groupe de familles s’établissent au lac Breeches. Ce sont les Catellier, les Gagné, les Giroux, les Faucher, les Thibodeau, les St-Laurent et les Gosselin. Ces familles viennent de la région de Lotbinière et de l’Ile d’Orléans. En 1878, Antoine Lapointe de Ste-Hénédine ouvre la 2e partie du rang V1. Étienne Adams, le premier maître poste, arrivant de Pennsylvanie, installe son magasin général sur la 1ère Rue (rue Laurier.).
La première messe est célébrée en 1878 dans la maison d’Honoré Morin (le premier hôtelier de Disraeli) par l’abbé Beaugrand-Champagne, curé de St-Gabriel-de-Stratford. Les curés Francoeur de Stratford, Blanchard de Weedon et Plante de Garthby assureront tour à tour les services religieux jusqu’en 1884. La desserte sera connue sous le nom de Ste-Luce de Stratford ou Ste-Luce de Garthby avant de devenir Ste-Luce de Disraeli.
L’installation (1879 – 1924) On pourrait diviser l’Histoire de Disraeli en deux grandes étapes. La 1ère, qualifiée d’installation, va de 1879(année de la construction de la gare et de la requête pour l’érection de la chapelle) jusqu’à 1924 (année de l’incendie de la première église). Cette période est marquée par l’omniprésence de l’industrie forestière dans la vie économique de Disraeli. Cette activité est favorisée par deux moyens de transports essentiels : la rivière St-François, permettant la drave de milliers de billes de bois vers les moulins à scie et de papier, et le chemin de fer (1879) rendant possible le transport de produits transformés : traverses de voies ferrées, plançons (madriers), boîtes et seaux de bois (Disraeli Box) vers les marchés national et international.
Trois événements majeurs survenus en 1883 vont donner un essor important à l’organisation de la paroisse. Ce sera d’abord l’officialisation de la municipalité du canton de Disraeli et l’élection du premier maire John Champoux (2 février). En second lieu, la formation de la commission scolaire (16 juillet) dont la première institutrice fut Mlle Fecteau qui avait sa classe sur la 1ère rue (rue Laurier) et finalement la bénédiction de la 1ère église (13 novembre) et l’arrivée de son curé : l’abbé A.D. Jobin. Le presbytère sera construit en 1891. On donnera à la paroise le nom de Ste-Luce en l’honneur de Sr Ste-Lucie, supérieure du Mont Notre-Dame de Sherbrooke, qui avait rendu de précieux services au diocèse.
La municipalité, qui était connu au tout début sous le nom de Black Creek recevra, en 1877, le nom de Disraeli en souvenir de Benjamin Disraeli (Lord Beaconsfield 1804 – 1881), Premier-Ministre de Grande-Bretagne en 1868, année de l’arrivée de notre fondateur. Les premiers actes inscrits aux registres paroissiaux ont été : – Premier baptême : 13 janvier 1884 : Joseph, Pierre, Alfred Déry, fils de François Louis Déry, marchand et de Cédulie Desnoyers. – Premières sépultures : 27 janvier 1884 : Joseph, Edmond Fortin (2 jours) fils de Sévère Fortin et de Zoé Roy. – 28 janvier 1884 : William Jalbert dit Carleton (52 ans) époux de Résina Langis.
– Premier mariage : 22 avril 1884 : Napoléon Côté et Aurore Vallières. En 1897, la paroisse fera don d’un terrain pour la construction du couvent et de l’école Ste-Luce qui seront confiés aux religieuses des Sts-Noms-de-Jésus-et-de-Marie qui y dirigeront, au fil des ans une école ménagère (1944) puis une école normale pour jeunes filles. Pour ce qui est du premier collège, il faudra attendre en 1907 pour voir sa construction et en 1919 pour assister à l’arrivée des F.F. Maristes qui dirigeront l’établissement jusqu’en 1969, année du transfert du cours secondaire vers l’école polyvalente de Disraeli. Les religieuses et religieux abandonneront le secteur de l’enseignement à Disraeli vers 1985.
Pendant tout ce temps, la vie économique s’organise, ponctuée au rythme des saisons. En hiver, un nombre important de bûcherons iront en forêt, dans les chantiers de la région, faire la coupe du bois qui sera, le printemps venu, dirigé vers les moulins à scie locaux ou les moulins de papier de la Cie Brompton. Une importante équipe d’habiles draveurs, secondée par quatre bateaux de drave (steamboats) le Tobin, le Wilson, le McRea et le Marine, mèneront ce bois à St-Gérard et, de là, en suivant le cours de la rivière St-François, jusqu’aux moulins à papier de la Cie Brompton.
L’été venu, plusieurs de ces bûcherons et draveurs se transformeront en habitants et cultiveront leur petit lopin de terre. Les autres iront travailler à la Cie Champoux ou dans les moulins à scie établis à proximité du lac. Vers 1892, la Cie Parent et Frères (Joseph et Honoré) ouvre une manufacture de portes et châssis qui fonctionnera sous ce nom jusqu’en 1925 puis sous le nom de Vachon et Parent de 1925 à 1930. La compagnie va se spécialiser dans l’ameublement d’église. La manufacture passera au feu, sera reconstruite et vendue à Adélard Lehoux.
La population et la production industrielle étant en rapide augmentation, il deviendra urgent de se donner de nouveaux services à la hauteur de ce développement. On pense d’abord à faciliter l’ accès au village des familles établies dans le secteur du Breeches. En 1879, le bac (bateau passeur de M. Vilmaire Brousseau) en fonction depuis 1877, qui servait de lien entre les deux rives du lac Aylmer, sera remplacé par un premier pont de bois arrivant sur la rue Jobin. En 1908, on construira le pont actuel qui donne sur la rue St-Joseph. En 1904 la campagne se détache du village pour former une entité administrative distincte. Vers 1900, la Banque Provinciale ouvre une succursale à Disraeli.
La Cie de téléphone de Disraeli est créée en 1914 par P.A.Labrecque, Pierre et Alphonse Létourneau, qui invitèrent les paroisses avoisinantes Garthby, Stratford et St-Jacques, à en faire partie. Cette première période sera marquée par une série d’incendies majeurs qui viendront transformer le visage du village. En 1907, c’est un secteur important de la 1ère rue (rue Laurier) qui s’envole en fumée. Quelques années plus tard, en 1911, la rue Champoux, à son tour, est la proie des flammes.
Plusieurs magasins et demeures sont complètement détruits. L’absence de service d’incendie et la nécessité de recourir à l’assistance des pompiers de Sherbrooke ou de Thetford expliquent en partie ces désastres. L’incendie de la première église, le 25 avril 1924, la reconstruction de l’actuelle église en 1926 (1) et le déménagement du presbytère en 1927 marqueront la fin de la première période. (1) Dès le 11 mai 1924, les marguilliers votent unanimement, avec l’appui de la population, la reconstruction de l’église. Conçue par l’architecte sherbrookois, Louis Audet, l’église actuelle mesure 180’ de longueur par 71’ de largeur. Au clocher (tête de la croix au niveau du sol) la hauteur est de 153’. Les plans prévoient 966 places assises. Les travaux sont confiés à l’entrepreneur Dion & Bonin, également de Sherbrooke, pour la somme de 117,000$.
La pierre de granit utilisée provient des carrières St-Samuel. L’orgue fut commandé à la Compagnie canadienne des Orgues de St-Hyacinthe pour la somme de 2,600$. Trois cloches furent commandées, au coût de 3,120$ à la maison européenne Raccord par la voie d’un importateur de Québec. Ce trio, d’un poids total de 4,691 lbs, fut consacré et «baptisé » de la façon suivante lors de sa bénédiction : Cloche FA : 2,085 lbs – Pie Xl, Paul, Osias. Cloche SOL : 1,538 lbs – Joseph, Amédée, Georges. Cloche LA : 1,068 lbs –Marie, Luce, Alphonse de Ligori. La cérémonie de bénédiction de la pierre angulaire de la nouvelle construction eut lieu le 12 octobre 1924.
Elle fut placée à l’angle du mur de la porte centrale du côté de l’épître (Villa Lavoie) La première grand’messe chantée dans cette église non encore terminée y fut célébrée à Noël 1925. La bénédiction officielle de l’église avec son orgue et ses trois cloches se fit le 25 juillet 1926. (Cf : Lee feuillet paroissial de la communauté chrétienne Ste-Luce, Disraeli 25 juin1989.) La diversification (1930 –2002) La deuxième étape de l’évolution de Disraeli va de 1930 à nos jours. Elle débute par 10 ans de stagnation causée par la Grande Crise économique (1929-39), suivi d’une reprise à la faveur de la guerre. Cette relance va amener chez nous une diversification et une modernisation industrielles.
Le commerce du bois et la drave vont reprendre. Les anciens ‘steamboats’ seront remplacés par les ‘Tugboats’, plus rapides et plus efficaces. Les plus âgés se rappellent encore du bruit particulier de ces bateaux lorsqu’ils se rapprochaient du camp des draveurs situé à la sortie de Disraeli, en direction de Stratford. La drave prit fin vers 1960. Le camp des draveurs fut démoli et les bateaux disparurent.
Le Quebec Central Railway reste, à cette époque, le principal moyen de transport. Chaque jour, quatre trains de voyageurs passent par Disraeli. Deux en direction de Sherbrooke et deux en direction de Québec, sans compter les nombreux trains de marchandises qui alimentent Disraeli et sa région en produits de toutes sortes.
La généralisation de l’automobile et du camion comme moyens de transport va causer la mort du chemin de fer dans la région. En 1969, le Q.C.R. cessera son service et la gare, qui avait été depuis ses débuts, un important centre d’intérêt, sera démolie. En 1934, le conseil municipal louera la salle paroissiale Jacques-Cartier, située sur le site de l’actuel hôtel de ville, à M. Louis De Luca, pour qu’il y établisse une manufacture d’habits et de paletots. Cette industrie, des plus modernes, emploiera jusqu’à 50 ouvrières. Ce sera la première entreprise à employer une main d’œuvre féminine. Malheureusement, les flammes détruiront complètement l’édifice, le 18 novembre 1947.
Huit cents paletots d’hiver devaient être expédiés le lendemain matin. Les pertes furent évaluées à 100,000$. En 1940, MM. Roméo Gaudreau et Gérard Dubreuil ouvrent une fabrique de liqueurs douces qui produira, entre autre, les boissons Mélody et Opéra Cocktail.
En 1934, naîtra la coopérative agricole de Disraeli, suivie dix ans plus tard de la Caisse populaire Desjardins. En 1944, la municipalité vendra sa nouvelle salle paroissiale, sise à l’angle des rues St-Joseph et St-François, à M. Émile Gosselin qui y établira une manufacture de meubles. Cette industrie sera, par la suite, tour à tour la propriété de la famille Beaudoin, de Marius Ouellet, du groupe Radisson et finalement de la Cie Shermag. C’est aujourd’hui le principal employeur de Disraeli et les meubles fabriqués dans cette usine sont vendus à travers le Canada et les États-Unis. Au delà de 200 personnes y travaillent présentement. L’année 1945 sera marquée par un développement industriel sans précédent.
Trois manufactures s’installent chez nous.
Il s’agit d’abord de la « Quebec Woodenware Limited », propriété de la famille Bienvenue (anciens propriétaires de la Disraeli Box). L’usine produira des seaux et des boîtes de bois. Ensuite, les frères Gagné (Roland, Roméo et Gérard) mettront sur pied une manufacture de portes et fenêtres. L’industrie sera connue sous le nom de «R. Gagné et Frères Enr. ».
Finalement, Gérard Clark ouvre une petite entreprise de fabrication de lattes et de barreaux. La fin de la deuxième guerre mondiale et le boom économique qui s’ensuit amènent une forte demande de métaux métalliques et non métalliques. Ce soudain besoin favorisera l’ouverture de nouvelles mines d’amiante et de cuivre dans la région. Plusieurs travailleurs de chez-nous, attirés par les salaires élevés trouvent un emploi dans les mines d’amiante de Black-Lake et Coleraine.
La mine de cuivre Solbec de Stratford ouvre et donne de l’ouvrage à plusieurs ouvriers de Disraeli, en plus d’attirer une quantité appréciable de gens venant de l’Abitibi. Cette nouvelle prospérité économique va contribuer au développement de la municipalité. Des secteurs nouveaux vont s’ajouter. C’est le cas du quartier Gervais, en direction de Coleraine, et du quartier Dion, de l’autre côté du pont, vers St-Jacques .
Disraeli s’affirme de plus en plus comme petit centre régional. Une variété de services apparaissent : le Cinéma Couture en 1946 se veut un lieu de divertissement très apprécié par les jeunes de la région. Des salles de patins à roulettes et de quilles viendront compléter ce volet. La régionalisation scolaire des années 1965 va rendre possible la construction de l’école polyvalente de Disraeli, regroupant les élèves du secondaire d’une dizaine de municipalités environnantes.
La Cie Setlakwe de Thetford achètera l’ancienne mercerie Anto et Zako et s’implantera à Disraeli. En 1969, le couvent Ste-Luce sera démoli et remplacé par le Foyer de Disraeli, une résidence pour personnes âgées. Le domaine de l’industrie va également se transformer. Dans le but d’attirer de nouvelles usines, la ville va se doter d’un secteur industriel, situé sur la route 112, en direction de Beaulac.
L’usine Nutech et les Entreprises J.G. Landry vont s’y établir. Un motel industriel va même y voir le jour. La paroisse Ste-Luce de Disraeli va absorber les paroisses Ste-Praxède et St-Jacques –Le-Majeur. C’est maintenant au tour du curé de Disraeli d’assurer les services religieux à St-Gabriel de Stratford et St-Charles Borromée de Beaulac. Cependant, la ville de Disraeli, à l’image des autres municipalités de la région et d’un peu partout à travers le Québec, assiste aujourd’hui, impuissante, à la baisse et au vieillissement de sa population.
Une école (St-Antoine), qui accueillait jadis des dizaines d’étudiants change de vocation et se transforme en centre communautaire. Des foyers pour personnes âgées naissent : Le Foyer St-Rosaire, le Foyer de Disraeli et plus récemment la Roseraie (2001). L’office Municipal d’Habitation de Disraeli va bâtir deux H.L.M. : le Chaînon d’Or en 1985 et le Domisiladoré en 1990. Une volonté de reprise en main et de rajeunissement est toutefois de plus en plus perceptible.
En 1976, la ville bâtit l’aréna à proximité de l’école polyvalente. La Chambre de Commerce renaît et réalise la Marina en 1996. Des groupements de citoyens (Berges Neuves qui projettent d’aménager les rives de la rivière) se forment, prêts à s’investir dans le développement économique, social et culturel du milieu. Un journal communautaire (Le Cantonnier) voit le jour en 1999. Ce qui nous laisse croire que la devise de Disraeli « De progressu in progressum » est toujours aussi vivante.